Conséquences des cheveux sur les pattes des pigeons ou histoire de Petit Oiseau

Et la fille laissa ses cheveux à la disposition des oiseaux pour leur construire un nid douillet…. Un matin, en ouvrant ma fenêtre, sur ma jardinière, je trouve de magnifiques cheveux féminins nimbés de la rosée du matin.

La poésie s’arrête là car la réalité est moins poétique. J’ai récupéré les cheveux et je les ai mis directement à la poubelle, pas au tri sélectif, non à la poubelle pour être brulés. En effet, la jardinière en question est le lieu de passage d’un pigeon ramier qui mange les restes de graines de mes 4 pigeons biset d’appartement (qui se croient chez Rothchild et gaspillent beaucoup. Je suis étonnée que mes pigeons fassent des calculs de probabilité quand ils se nourrissent et trient leurs graines mais à l’extérieur, il y a des oiseaux bien moins difficiles).

Bon, revenons aux cheveux. Hier soir, en prospectant les lieux où vivent les pigeons à Rennes, j’ai trouvé un pigeon biset qui se tenait sur une patte, volait peu et mangeait une bout de Cracotte humide car il commençait à pleuvoir. J’ai réussi à capturer l’oiseau épuisé qui volait peu et bas. Il m’a échappée la première fois mais la seconde fois, je lui ai parlé doucement et j’ai pu le prendre sous les commentaires de jeunes du quartier qui m’ont finalement applaudi quand je l’ai attrapé et quand je l’ai embrassé.

Je l’ai ramené chez moi. Mon mari l’a tenu pendant que je coupais les cheveux qui lui emprisonnaient la patte et lui rentraient dans la chair et je vous prie de croire que c’est dégoûtant. Je me suis demandée si j’allais m’en sortir avec ma petite paire de ciseaux fins de couturière. Le doigt était tellement compressé qu’il s’est mis à saigner. D’ailleurs il est tellement petit et maigre pour un pigeon adulte que je ne sais même pas s’il va s’en sortir.

J’ai couru à la pharmacie avant la fermeture acheter un antiseptique sous format spray sans alcool et qui ne pique pas. J’ai contacté Myriam de Lapalomatriste qui m’a rappelée de lui mettre ensuite une crème antiseptique cicatrisante. Je lui ai mis une crème anti-escarre.

Je l’ai laissé ensuite au calme dans une cage de transports pour chat (qui sert à transporter mes pigeons d’appartement d’habitude) avec des chiffons propres au fond de la cage, avec de l’eau et de la graine pour canari. Il n’a rien mangé ni bu.

Ce matin, il était en vie et il s’était tourné (il a passé la nuit au calme dans une pièce isolée, ni trop lumineuse, ni trop noire). Avant que je parte au travail, il s’est mis sur sa patte valide. J’espère qu’il va accepter de manger car il n’a rien dans le ventre et il a fait une seule fiente molle car il avait peur et mal quand nous le tenions, mon mari et moi. Si je vois qu’il n’a rien mangé ce soir, je recontacte Myriam afin de savoir si je dois le nourrir de force pour tenter de lui faire reprendre des forces. Je suis en plein dilemme, une fois de plus sur les choix à faire. J’espère que mon mari va remettre la main sur la pince à épiler, je crois qu’il reste encore des cheveux coupés incrustés dans la chair (franchement peu romantique les cheveux).

Vendredi soir, le pigeon a perdu son doigt et je ne l’ai même pas retrouvé. Je le retrouverai plus tard accroché dans un vêtement. Il saignait abondamment et battait des ailes. Le traitement pour arrêter le saignement a été le suivant : coton Hydrophile et eau oxygénée. Ensuite, il a eu droit à une solution antiseptique de chez Cooper qui ne pique pas mais il faut quand même protéger les yeux et une crème cicatrisante à base d’acide hyaluronique appelée Ialucet.

Auparavant, j’avais tenté d’enlever encore des cheveux incrustés dans la chair avec un bain de patte au Dakin solution antiseptique à base de javel et de la crème au Karité. J’ai utilisé une pince à épiler pour les enlever et cela marche très bien. J’ai enlevé des cheveux à trois reprises.

Pour éviter une septicémie de sa patte (il avait son doigt inerte et une excroissance qui noircissait par dessus), Myriam, de Lapalomatriste, m’a conseillée de lui acheter de l’Amoxycilline type Synulox, comprimés de 50 mg à diviser par deux pour obtenir 25 mg de produit à écraser dans 20 ml d’eau. Il faut lui donner 1 ml par jour et la solution peut se conserver 3 jours au réfrigérateur, il faut mélanger avant la poudre rose ainsi obtenue car le traitement n’est pas prévu pour les pigeons à la base. C’est l’antibiotique utilisé dans le cas des pigeons blessés par les chats pour leur éviter la mort à cause de la salive du chat qui contient des germes.

Il lui fallait pour la douleur également du Métoxycam, un produit pour chat pour lutter contre la douleur appelé Metacam dosage une goutte par jour pendant 10 jours. Impossible d’avoir le médicament en pharmacie (guéguerre entre les pharmaciens et les vétos) et il m’a fallu le samedi faire 2 vétos pour avoir enfin le traitement pour ce pauvre oiseau. Je lui ai donné également du Tonivit, une vitamine pour oiseaux et autres animaux. Mon mari et moi lui avons fait également un pansement avec une compresse et un sparadrap pour peau sensible (trousse de secours pour humains).

Au début, avec le spray aseptisant et la crème cicatrisante, nous lui faisions un pansement tous les jours mais maintenant c’est seulement tous les deux jours. L’oiseau pèse 280 gr, il a un poids et une taille inférieurs à la norme. Il vole peu, il commence à poser sa patte sur le sol mais reste le plus souvent couché dans sa cage à chat (très pratique). Il mange bien et boit correctement, ses excréments sont normaux et bien moulés.

Il commence à grogner si je le touche, il tente de me mordre et me donne des coups de bec, il parait plus vif, il commence à soulever ses ailes et à s’éplucher, ce qui est un signe de bien-être, je le mets au soleil et il adore cela, il regarde par la fenêtre. Je pense qu’il est tiré d’affaire. Cependant, il reste une excroissance qui l’empêche d’utiliser son petit doigt placé à l’arrière. Il cicatrise bien et la plupart du sang noir est parti. Vu son état, je pense qu’il ne pourra jamais être remis en liberté. C’est un oiseau adulte (couleur de son fond d’œil très orange) mais il a la taille d’un jeune de trois ou 4 mois.

Cela fait maintenant 3 semaines que j’ai le pigeon chez moi. Sur les conseils de Myriam, l’oiseau a eu un traitement de 7 jours. Au bout des 7 jours, j’ai arrêté les pansements, l’antibiotique et le traitement anti-inflammatoire. L’oiseau boite et le petit doigt qui est en arrière de sa patte normalement est venu se placer à la place du doigt perdu.

J’ai décidé de faire mon possible pour réduire son handicap, je l’ai lavé avec un savon noir à la rose (certifié non corrosif pour les animaux) car ses plumes étaient très sales (pollution de la ville où il ne peut pas se laver faute d’eau potable, sang, traces de médicaments, traces d’excréments). Je l’ai d’abord fait tremper un peu pour enlever le surplus de saleté (il lissait ses plumes sales tous les jours), il a eu droit ensuite à un lavage et deux rinçages. Il a gardé des traces de mercurochrome sur ses plumes blanches.

Je l’ai amené chez mon vétérinaire NAC qui s’appelle le docteur Tizon et se trouve au Bd Voltaire. Je lui fais confiance parce qu’il soigne gratuitement les oiseaux des villes trouvés par les personnes. J’ai commencé aussi à rédiger ma fiche de soins pour pigeonneaux, soins, alimentation, nature des problèmes rencontrés et soins à fournir et je lui ai donnée. Il a eu sa formation à la clinique vétérinaire de la Maison Alfort et c’est un autre niveau que les vétos juniors qui passent en ce moment sur la chaîne 4. Il peut soigner tous les animaux sauvages trouvés par des personnes aimant les animaux. Il a vérifié si le doigt avait une fracture, ce n’était pas le cas. Je voulais savoir si mon oiseau pourrait bénéficier d’une orthèse pour redresser son doigt mais il m’a dit que cela lui ferait plus de mal que de bien et qu’il valait mieux le laisser comme cela. J’ai appris quand même que c’était un jeune oiseau (jeune adulte), d’où son poids inférieur de 100 gr à celui de mes 2 pigeons adultes (Titi et Paloma).

Au début, je ne l’ai pas beaucoup sorti, il devait avoir des soins et il était quand même souvent couché dans sa cage à chat.

Je l’ai mis en contact avec mes autres pigeons, il s’est battu à deux reprises avec Titi qui est un mâle dominant avant que j’ai eu le temps de bouger mais maintenant Titi le laisse tranquille car handicapé ou pas, il n’a pas eu le dessus avec un pigeon SDF habitué à lutter pour survivre. Il roucoule de colère lorsqu’un de mes autres pigeons l’approche, même s’il n’est pas agressif du tout, il chasse les autres pour avoir de l’espace. Cependant, il commence quand même à se sociabiliser car il les suit dans le couloir ou la chambre. Il boite et se perche sur les meubles en cherchant une position confortable.

Depuis le début de la semaine, je le libère aussi le soir mais je l’isole cependant dans le séjour si je dois m’absenter. Mes pigeons sont enfermés en journée mais je les libère tous les soirs pour leur permettre de marcher, de voler et d’éviter de s’ennuyer. Pour l’instant, ce cher oiseau s’habitue à l’appartement, aux lieux où il peut aller, à vivre avec les autres. Il mange bien, vole peu, secoue beaucoup ses ailes pour les tester, aime le soleil et l’ombre. Je ne sais pas si c’est un mâle ou une femelle et je m’en moque. Malgré son handicap, c’est un bel oiseau avec de belles couleurs blanches et grises. Il est plus détendu qu’à son arrivée. Sa cage est nettoyée 2 fois par jour comme pour les autres car je l’ai mis à part. Mes 4 autres pigeons sont groupés dans la même cage.

Je suis heureuse d’avoir ce bel oiseau avec moi, j’espère que la qualité de son plumage va s’améliorer dans l’avenir. En tout cas, il est hors de question de le relâcher dans un environnement où il faut voler très haut (immeuble de 12 étages) et très loin (à la périphérie de Rennes où il y a des champs). Il est trop jeune, trop faible, trop handicapé pour une vie aussi dure. Près du supermarché où je l’ai trouvé, il n’y a que des restes, d’ailleurs son ventre était vide quand je l’ai trouvé. Je sais pour en avoir eu entre les mains que les pigeons de ce quartier vont chercher du maïs et du blé dans les champs, en touchant leur jabot, on peut le sentir. Pour l’instant, même si j’ai des moyens sommaires pour l’hébergement des oiseaux trouvés, ils sont quand même mieux chez moi que dehors en train de mourir de faim à petit feu.

Je n’ai jamais vu un oiseau sauvage s’adapter aussi facilement et se transformer en pigeon de compagnie. Ses plumes étaient de mauvaise qualité, il a maintenant un magnifique plumage. Il était maigre, il est maintenant bien en chair et de belle proportion. Il a une démarche des plus amusantes à cause de son doigt situé sous sa patte et cela lui donne la démarche d’Aldo Macione, quand je le regarde, je trouve qu’il a même le regard de l’acteur en question et quand il râle parce qu’il n’est pas content, il me fait penser à un italien et franchement, je me marre rien qu’en le voyant s’exprimer, la tête et le buste en avant, le derrière en arrière (je trouve qu’il a carrément la démarche de l’acteur et je rigole encore plus).

Chez moi, il a trouvé une copine dont je raconterai également l’histoire car c’est une des filles de Titi et Paloma. Je ne pense pas que dans l’état où je l’ai trouvé, il avait pu en rencontrer une et lui proposer de « faire un petit nid ».

S’il y a un pigeon heureux de sa nouvelle vie, c’est celui-là. En été, au soleil, je le vois mâchonner de satisfaction avec son petit bec, couché sur le sol chaud de sa cage d’extérieur quand il va dans le Morbihan chez mon père. Il peut se baigner, boire de l’eau propre, faire son difficile et trier ses graines, manger, dormir, ne pas avoir à galoper pour trouver la nourriture, il n’a plus froid en hiver.

Petit Oiseau est un pigeon heureux mais exigeant quand même sur certains points. Son grand passe-temps est de rechercher des « petits nids » à différents endroits pour sa copine, appelée Bébé 1. Je peux le retrouver dans le meuble de télévision, dans le placard (une fois il a fallu carrément le chercher et le placard était fermé, grand moment de panique ! Où est mon petit Oiseau ?), sous le buffet de la cuisine, sous le fauteuil, sous mon lit, dans les pièces où c’est interdit d’aller, tant qu’à faire, c’est mieux et là, quand je le trouve et que moi ou mon mari, nous lui demandons de sortir en lui montrant la porte du doigt, il sort lentement, tape du pied devant le seuil et râle et monsieur prend son temps parce qu’il n’est pas content du tout. Evidemment, la copine le suit comme son ombre.

Il a appris aussi à faire le « petit caca » dans les toilettes, d’ailleurs il est capable de faire un tout petit excrément de rien du tout simplement pour que je lui foute la paix afin qu’il puisse de nouveau s’envoler dans le couloir. Il est bien le dernier à rentrer dans sa « petite maison » c’est-à-dire sa cage. Il est cependant capable de d’adapter à n’importe quelle cage et de demander à sa copine de faire le nid n’importe où. Le transfert d’une cage à l’autre ne le dérange pas du tout. Il est habitué aussi aux trajets en voiture.

Il était très maigre à son arrivée et comme il était épuisé, il n’a pas roucoulé tout de suite. Alors je l’ai surnommé Petit Oiseau et c’est resté. Maintenant j’avoue que son nom ne rime plus à rien car il est de taille normale voire de belle taille pour un pigeon biset et il est complètement transformé par rapport à l’oiseau malingre que j’ai récupéré au départ. Je suis très heureuse de ce qu’il est devenu. Il a même un beau jabot avec quelques couleurs irisées mauves et vertes et ce jabot se gonfle bien quand il roucoule.